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Photo du rédacteurMariama Sylla

Ce n’est pas de la froideur !



Stéphane

J’étais à Kyôto pour quelques jours lors de mon premier voyage au Japon, hébergé dans la maison réservée aux visiteurs des parents d’une amie japonaise de longue date, dans le quartier d’Uzumasa. Très certainement, je devais être l’un des rares étrangers européens, sinon le seul français dans ce quartier loin des sites touristiques de l’ancienne capitale impériale.


Un soir, en rentrant justement de l’un de ces sites, au sortir du train, je me retrouve tout seul dans une petite rue, incapable de me repérer pour rentrer jusqu’à la maison. Venant en face et arrêtée au feu tricolore, une Japonaise attendait sur son vélo, la seule autre personne présente dans la rue en cette fin de journée.D’un pas décidé, donc, je me dirige vers elle, avec dans l’idée de lui demander mon chemin. Mais en me voyant approcher dans sa direction, la femme penche son visage vers son guidon, soudainement prise d’une myopie sévère… Elle ne bouge pas d’un pouce ; je perçois même toute sa persévérance à ne pas regarder dans ma direction à mesure que je me rapproche d’elle. Si seulement le feu pouvait passer au bleu (l‘équivalent du vert au Japon) ; si seulement… Elle le pensait si fort, si fort !!

Mais, hélas pour elle, ce ne fut pas le cas. Et, arrivé près d’elle, je la salue puis lui indique que je suis perdu. Je l’apostrophe en japonais. Alors, miracle !! Le visage se relève, son expression se détend et, sans ne plus prêter aucune attention au feu, elle fait le maximum pour me renseigner. Elle m’a même semblé contente de me voir comprendre et lui assurer que j’avais compris et la remerciait. Puis, sur un signe de la main, elle a enfourché son vélo puis a poursuivi ta route.

Eh oui ! J’aurais pu être et certainement que je l’ai été, désarçonné par sa première réaction. J’aurais pu le prendre pour de la froideur, voire de l’antipathie pour l’étranger que je suis…

Mais ce n’était pas ça, pas du tout, m’a expliqué une amie japonaise, une fois de retour à Paris. Très certainement que cette femme, ne sachant pas que je pouvais m’exprimer et comprendre le japonais, très certainement donc, qu’elle avait été sûre, avant même de m’entendre, de ne pas être capable de comprendre ce que je lui aurais dit puis qu’elle n’aurait pas su non plus en quelle langue me parler. Au final, elle était déjà persuadée de ne pas être capable de me venir en aide. Alors, plutôt que cela et risquer de me décevoir, elle avait opté pour cette tentative d’invisibilité, cette fermeture de tout son comportement.



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